Exister, Robert Neuburger
- Popi Oreo
- 21 août 2024
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 sept. 2024
Ce que je retiens de ce livre à la fois philosophique, sociologique, ethnologique et plein de bon sens, c’est qu’un psychiatre et psychanalyste tel que R. Neuburger ne fait pas confiance aux classifications psychiatriques pour étiqueter une personne qui présente une souffrance existentielle. La société médicale crée la dépression là où il ne faudrait qu’y voir une saine réaction d’adaptation à une situation qui provoque rage et/ou désespoir. La seule réponse alors est le médicament comme l’antidépresseur par exemple, délivré à outrance comme s’il était impossible pour les médecins d’avoir cette « curiosité bienveillante » afin de ne pas faire rentrer les personnes dans des catégories du DSM mais de considérer chacun comme ayant un symptôme unique qui signifie quelque chose qu’il faut déchiffrer, analyser avec le patient. Un scénario catastrophe a conduit une personne confrontée à un environnement insatisfaisant où sa dignité a été malmenée, à refuser de s’y adapter. Selon George Devereux, ethnopsychanalyste, un déprimé est un inadapté normal.
R.Neuburger prend l’exemple d’une femme hospitalisée à maintes reprise pour dépression, que tous ont étiquetée comme malade dépressive et qui se vit elle même comme telle, ayant perdu toute dignité (se laissant complètement aller) et qui s’accuse de l’échec de son couple. En changeant de logique, de perspective, de scénario, le thérapeute qui rencontre le couple s’aperçoit que cette place non enviable de « malade » protégeait toute la famille, car ce couple n’était pas désiré par les deux membres mais arrangé par leurs familles. Elle a donc dû étouffer sa rage et sa frustration en les transformant en « dépression » quasiment biologique ( non réactionnelle).
La médecine offre une identité substitutive à celui qui souffre de solitude, d’isolement (perte d’emploi, divorce..). Dans son discours vous êtes un(e) déprimé-e appartenant à la classe des déprimés. Une fois la relation de confiance établie avec le corps médical, qui délivre la pilule magique et qui offre son écoute au bon patient qui écoute son médecin sagement, il est très difficile de reprendre sa vie en main et d’oser affirmer que l’on n’est pas malade.
« Le pire est de croire que la « dépression » est la conséquence d’un dispositif génétique, donc d’un destin irrémédiable. Cette position permet aux praticiens de s’arroger un pouvoir exorbitant, celui de ne pas guérir puisqu’il s’agirait d’un problème lié au destin programmé par la génétique chez leurs patients ! »
Comprendre ce que le patient exprime au travers du langage de ses symptômes lui rendra sa dignité « afin qu’il réintègre la communauté des humains. »

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