Est-ce que tu m'aimes encore?

Je recommande ce livre poche à tous les "infidèles" et les "trompés". Le Docteur Fauré dé-dramatise, dé-moralise, et donnent des pistes précises pour reconstruire son couple après un accident de parcours ou une réelle vie double.

Quels mots utiliser se demande Dr Fauré pour ne pas se positionner en juge ou moralisateur? (trompant, trompé, maîtresse, amant, relation extraconjugale..) Mais il faut bien nommer les choses.

L'auteur nous donne la définition de l'infidélité de la psychologue américaine Shirley Glass :

1. Il existe un secret autour de cette relation.

2. On retrouve une implication émotionnelle de la part de la personne infidèle.

Il existe une alchimie sexuelle entre les deux personnes (sans qu'il y ait nécessairement de rapports sexuels, ce qui inclut les relations virtuelles via Internet).

Toute personne, dans ce triangle de l'infidélité, est porteur du désir d'aimer et d'être aimé. C'est très important. La littérature anglo-saxonne (surtout américaine) sur l'infidélité regorge de jugements moraux radicaux (trompeur) et de discours victimisants (trompé).

L'auteur ici écrit ce livre pour encourager la reconstruction du couple après l'infidélité. Si des cas d'infidélités répétées conduisent à la rupture définitive, ce n'est pas le cas de figure le plus fréquent. Il y a un réel espoir de réconciliation et de reconstruction après cette crise majeure au sein du couple.

La personne infidèle se sent renaître, écoutée, différente, découvrant des aspects oubliés ou inconnus d'elle. Cela produit une excitation : un souffle de liberté qui ravive en elle ce que le couple a éteint. La fusion des premiers regards, des conversations interminables, la découverte de mille et une affinités... Le changement produit est tel que la personne trompée s'en aperçoit (changement de vêtements, de coiffure, d'allure, d'humeur..)

Se taire quand on trompe ? Cela protège l'autre. La personne trompée qui surprend l'infidélité se sent manipulée (il m'a fait volontairement du mal) alors que la personne infidèle voulait protéger son couple de la rupture.

S'engager dans une relation extraconjugale, c'est inviter le mensonge dans son existence. Et ces mensonges ont un prix : celui de la culpabilité. L'infidèle n'est jamais serein.

Mais néanmoins il est préférable de se taire car le conjoint trompé risque de ne jamais pardonner et le couple ne pourra plus se reconstruire. La révélation serait une façon de se déculpabiliser et de se décharger sur l'autre de cette "faute" qu'on ne parvient plus à porter seul(e). Mais cette culpabilité ne lui appartient pas ! C'est à l'infidèle de se débrouiller avec la "faute".

Ceci dit, si la personne trompée demande des aveux car elle a des preuves ou des intuitions, il est nécessaire de lui donner les informations le plus honnêtement et précisément possible (sans rentrer dans les détails qui font souffrir inutilement concernant les relations sexuelles par exemple ou sans la comparer avec l'amant(e)).

La nouvelle produit un véritable choc qui peut ressembler au syndrome de stress post traumatique (SSPT) chez la "victime" : pensées obsédantes, ruminations, stress chronique, hypervigilance et attitude d'évitement. Il peut y avoir des comportements addictifs (alcool) pour étouffer la peine. A terme, la personne peut tomber dans la dépression par épuisement : troubles du sommeil avec insomnie, perte d’appétit ou boulimie compensatoire, sentiment d'être constamment fatigué, perte d'intérêt pour tout ce qui faisait plaisir, tristesse accompagnée parfois d'idées suicidaires, perte de sens des choses et vision négative de l'avenir (je ne pourrait plus jamais aimer).

La colère est incontournable : elle est une protection psychique contre l'impuissance et l'agression de l'infidélité.

Les personnes les plus vulnérables sont celles qui souffrent d'une trop grande dépendance affective avec à la base un perception négative et dévalorisée d'elles-mêmes. L'infidélité est alors la preuve qu'elles sont vraiment "nulles" et peu intéressantes. L'impact de cette infidélité est d'autant plus violent qu'il touche de profondes failles intérieures.

Après le choc de l'annonce ?

Il faut contenir l'impact émotionnel est ne pas prendre de décision sous le coup de l'émotion. Accueillir les émotions au lieu de les refouler, les extérioriser (en en parlant à des proches ou mieux à un thérapeute) pour mieux les accepter.

Se reconstruire avec l'aide d'un(e) psychologue ou psychanalyste permet d'investir les domaines sur lesquels on toujours prise : se remettre au sport, ou à la musique, à la peinture, revoir des amis qu'on avait délaissés du temps du couple, trouver auprès de son thérapeute un espace pour comprendre ce qu'on est en train de vivre et exprimer nos émotions : identifier ainsi nos propres besoins et y répondre le mieux possible afin de restaurer l'estime de soi et de se recentrer sur nos désirs : "je peux moi aussi prendre soin de moi, il n'y a pas que mon conjoint qui a le droit de prendre du bon temps"

Il faut éviter de parler de vos problèmes de couples avec vos parents, enfants ou amis : en cas de retrouvailles et de réconciliation, ils se seront arrêtés sur votre désespoir et l'image du conjoint coupable et misérable que vous leur aurez dépeint.

La réconciliation est-elle possible ?

Certains facteurs favorisent une réconciliation de qualité : il s'agit d'une première infidélité ; la personne trompée a réussi à contenir ses émotions destructrices (violence verbale ou physique, culpabilisation massive, désir obsessionnel de vengeance) ; la personne infidèle a été honnête en faisant des aveux complets (marque de respect); elle a exprimé des remords sincères pour la peine causée; chacun a décidé de se réinvestir dans la relation et de collaborer pour trouver une issue favorable ; ils ont cherché à comprendre ensemble le sens de la relation extraconjugale avec ou sans l'aide d'un thérapeute; la personne infidèle accepte d’accueillir les émotions et les questions de la personne trompée avec patience et compréhension. En retour, la personne trompée renonce au harcèlement, aux reproches incessants et à la culpabilisation à outrance.

Reconstruire le couple est un travail de longue haleine, qui doit utiliser les principes de la communication non violente (M. Rosenberg) : reformuler ce que l'autre vient de dire afin de s'assurer qu'on a bien compris ce qu'il a dit ; énoncer ce que l'on ressent, en disant "je", plutôt que de recourir au "tu", qui condamne et juge, en contraignant l'autre à se mettre sur la défensive (le tu tue) ; expliquer ce que l'on ressent sans supposer que l'autre comprend nos émotions et ressentis sans qu'on ait besoin de lui en parler. Il ou elle n'est pas devin !...

Dr Fauré propose une liste de questions pour travailler sur les raisons de l'infidélité (chapitre les étapes de la reconstruction, comment se parler de façon constructive? pages 200-203)